La Castratrice chauve

« Vous ne savez pas, non, vous ne pouvez pas savoir ! »

 

Elle avait dit ça en montant dans les octaves et sur ses grands chevaux, tenant une main au-dessus d’elle, l’autre cachée sous le drap, et dodelinant de la tête, comme une chanteuse d’opérette à genoux sur le matelas de la chambre, entre les cuisseaux écartés du mari. Elle ne portait rien, qu’un soutien-gorge où débordaient des seins massifs, monumentaux, et une culotte, très large, qui lui prenait le ventre jusqu’au nombril. Son maquillage dégoulinait de toutes parts, bavait de tous ses pores, comme une graisse supérieure, comme une cire coulante. Pour finir, elle riait faux, en vocalises aiguës, et son gros corps tremblait terriblement de tout son rire.

 

Avachi sur le lit, Monsieur André perdait doucement de ses couleurs, il blêmissait au point de se confondre avec le drap, la bouche, les mains, le corps pris dans un tremblement incessant. Les images se voilaient devant lui, les formes, les contours s’évanouissaient dans une ombre blanche, et il ne percevait plus de sa femme cabrée au-dessus de lui que le visage rouge et boursouflé par les ans. La voix aussi commençait de lui faire défaut : quand il aurait voulu la pousser, crier, elle resta prisonnière de sa gorge, coincée dans la trachée.

Quelques minutes plus tôt, elle avait plongé sa tête sous le drap : Monsieur André en tenait une bonne, il fallait en profiter. Bien sûr que s’il avait su que sous le drap se trouvait un sécateur déplié prêt à l’émasculer, il n’en aurait rien fait, il se la serait gardée sa gaule de 15 cm. Mais il ne s’était pas méfié ; comme elle les avait ramenées d’une main près du pénis, il avait senti sous les couilles, en pensant que ce fût ses ongles, le contact froid de la contre-lame qui remontait doucement pour les cueillir en entier. Il eut à peine le temps de comprendre qu’une douleur immense le déchira.

Mais la section avait été manquée ; un deuxième coup rapide fut nécessaire pour prélever le restant de verge qui n’était pas venu à la première entaille. L’agitation du mari avait d’abord été violente, il jetait ses membres de tous les côtés, hurlant, s’époumonant sur le lit déjà repeint de son propre sang, salope, salope, criait-il à sa femme qui souriait en relevant la tête du drap et en tenant dans sa main le paquet de viande qui avait été le sien, salope, salope, je vais te tuer, mais déjà les forces lui manquaient, ses jambes ne répondaient plus, ses bras faiblissaient et le brouillard remplissait sa vision.

 

 

« Vous ne savez pas, non, vous ne pouvez pas savoir ! J’entends toujours le même discours, vous êtes tous les mêmes ! Mais maintenant ça ira, nous sommes quittes. »

 

H.B. de Feydy

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